L'ORGANISATION DES ENFANTS

 

Si la garde alternée est devenue au fil du temps, le type de garde quasi systématique dans le choix des parents ou de la part des J.A.F., ce choix est bien compliqué dans le cas d’un couple dont l’un des parents est pervers narcissique.
 

Jean-Charles Bouchoux, Psychanalyste et auteur du livre Les pervers narcissiques (Ed.Eyrolles), contredit l’idée que le mécanisme de perversion serait inné ou de type génétique :



Le mécanisme du pervers narcissique se rapproche de la psychose. Pour qu’un enfant risque de le devenir, il faut une structure psychique défaillante, c’est tout.
Si ça n’est pas le cas il ne le deviendra pas
 

Cependant, plus l’enfant passera des moments brefs, de courte durée avec son parent PN, plus la construction de sa structure psychique en sera protégée !
Mais ne nous y trompons pas ! La grande difficulté dans ce genre de décision, ce n’est pas de réfléchir à ce qu’il y a de mieux pour l’enfant mais à ce qu’il y a de moins pire…
 

En d’autres termes, et comme de nombreux auteurs et psychanalystes le soulignent, en mettant de la distance entre vous et le parent pervers/manipulateur, l’enfant pourra tout d’abord s’apercevoir que vous allez mieux et sera donc dans de meilleures conditions pour construire une objectivité plus en lien avec la réalité. Encore une fois, ne culpabilisez pas de quitter un conjoint pervers narcissique, c’est une bonne chose pour l’enfant, pour ne pas dire LA MEILLEURE CHOSE. Car en choisissant de partir, vous lui apprenez aussi à ne pas tomber dans les mécanismes sournois du pervers narcissique. "Il va voir que ce que fait le parent toxique ne fonctionne pas alors il ne le fera pas lui-même", précise Jean-Charles Bouchoux.


Pour autant, le fait de vivre une semaine sur deux avec le parent pervers narcissique risque fortement de cliver l’enfant. Ce mécanisme psychique consiste en une incapacité de percevoir en même temps les caractéristiques positives et négatives d’une personne, d’un événement ou d’un chose, incluant la perception de soi-même (voir définition Anne-Laure BUFFET).


Le clivage est le résultat d’une pensée dichotomique : tout est blanc ou tout est noir, tout est bon ou tout est mauvais (c’est la distorsion). C’est un mode de pensée primaire, évoluant vers un mode de pensée intégrée de l’enfance (trois mois), à l’âge adulte. Mais c’est aussi un mode de pensée excessif lorsqu’il perdure (pensée émotionnelle), un concentré d’une émotion intense, qui prend toute la place telle que la rage, l’impuissance, l’exaltation, etc.. C’est une sorte de filtre qui a pour fonction la protection de la personne afin de lui permettre des attachements, des séparations et éviter aussi certaines émotions difficilement tolérables comme le rejet, l’abandon, la destruction.

Et le clivage à aussi pour conséquences :

    • L’ alternance de visions contradictoires de soi, d’heure en heure, de jour en jour : idéalisation, dévalorisation, distorsions.

    • L’incertitude par rapport au présent et au futur : incapacité de se projeter dans l’avenir.

    • L’alternance de comportements contradictoires (qui serait alors perçu comme étant de la manipulation) selon que la personne se voit et voit les autres comme bons ou méchants, amis ou ennemis.

    • Des relations interpersonnelles intenses, instables, exprimées par des ruptures fréquentes ou des conflits fréquents auxquels l’enfant serait trop régulièrement confronté à l’école par exemple.

    • L’alternance au niveau des émotions : colère – rage / affection – passion / impuissance – tristesse.


Biensûr, l’installation d’un mécanisme de clivage peut varier d’un enfant à un autre, de son degré de sensibilité, plus ou moins exacerbée, et du temps qu’il va passer avec son parent PN.
Plus il partagera de temps avec la parent PN, plus il sera fragilisé et exposé… C’est bien connu, les enfants reproduisent ce que font leurs parents.
 

Christel Petit Collin, Coach Formatrice en développement personnel et auteur du livre Enfants de manipulateurs, cite en exemple Claire, maman de Nicolas, 11 ans :

 « Le problème quand on a la garde alternée ou que l’on vit avec un(e) manipulateur(rice) est que l’enfant sera forcément confronté aux agissements du parent toxique. "

Et Jean-Charles Bouchoux, Psychanalyste et auteur du livre Les pervers narcissiques (Ed.Eyrolles) souligne : « Il est quasiment impossible de le détecter chez l’enfant, tout simplement parce qu’ils agissent de manière manipulatrice à un moment donné. Freud disait : ‘les enfants sont des pervers polymorphes’. Ils nous testent, nous provoquent constamment".

La permanence de cet état est la seule chose qui peut mettre la puce à l’oreille. "Un adolescent peut vous balancer comme ça qu’il n’a qu’une envie c’est de partir de chez vous alors que pourtant il ne le fera pas, et l’heure d’après tout va bien, c’est conjoncturel. Chez un vrai pervers narcissique, c’est structurel, ça ne changera jamais".


Pour éviter donc, que ce genre de comportement ne s’installe, "il faut toujours apprendre à son enfant à assumer ses fautes, explique Christel Petitcollin. Ne rien laisser passer lorsqu’ il ment’’.

Le vrai fond du problème pour beaucoup de parents est souvent d’arriver à frustrer ses enfants. Dans ses conférences, Christel Petit Collin taquine souvent les parents en disant : “Vous savez que les profs ne font jamais d’interro surprise sur un sujet qui n’a jamais été vu en classe !  C’'est Votre enfant qui dormait en cours ! » 

Ou encore : « Non, tous les autres enfants de sa classe n’ont pas le dernier Iphone ! ”


Par conséquent, et autant que vous le pouvez, évitez le choix d’une garde alternée dans le cas d’un parent PN. Et ouvrez les yeux à votre enfant sans pour autant casser l’image parentale.

Exemples :

  • Si votre enfant revient chez vous en disant : "Papa dit que tu es méchante parce que tu veux lui voler tout son argent". Mieux vaut répondre calmement et avec de la distance : “ça c’est l’avis de ton père, ce n’est pas la réalité”.
     
  • Si le parent manipulateur porte des attaques concernant la garde et que l’enfant en parle : "Expliquez-lui que tout ça n’est pas votre faute. Que ce n’est ni maman, ni papa qui décide de la garde mais le juge”.
     
  • Pour déjouer la tactique du manipulateur aux yeux de votre enfant, n’hésitez pas à vous dire qu’il n’y a pas que vous qui pouvez y faire quelque chose. Pour le sortir de l’emprise du parent manipulateur, il faut lui montrer que ça ne fonctionne pas. "Les manipulateurs ont l’art de choisir par exemple une activité extra-scolaire que l’enfant va peut-être détester ou tout du moins qu’il ne va pas choisir mais surtout, qui embêtera au maximum l’autre dans son emploi du temps, explique Christel Petitcollin :

 

Souvent, j’entends les parents dire que c’est à l’enfant de se confronter au parent toxique pour dire qu’il n’aime pas faire du violon, mais non ! C’est au parent sain de prendre son téléphone d’appeler l’autre parent et de lui dire que lorsque c’est chez vous, ça ne se passe pas comme ça et puis c’est tout. L’enfant doit se sentir protéger.
Il faut lui montrer qu’au lieu d’être méchant et fort on peut aussi gagner en étant gentil et fort et l’exemple que prendra votre progéniture sera tout choisi


Extrait de l’article de Bénédicte Demmer, Journaliste